
L’huître d’Hossegor n’aurait jamais vu le jour sans l’intervention de… Napoléon III, rien que ça ! Sa décision de créer un lac marin pour chasser le sable du port à la fin du 19e siècle a débouché sur l’implantation de parcs à huîtres. Une activité qui se développe grâce aux cabanes de dégustation.
Elles sont toutes regroupées au sud du lac, avec une vue à couper le souffle pour ceux qui y sont attablés : la chaîne des Pyrénées se reflète dans les eaux calmes du lac d’Hossegor. Ce qui donne aux fruits de mer une saveur incomparable ! Jérôme Labeguerie est à l’origine de ces cabanes de dégustation.
« En 1876, il y avait 40 ostréiculteurs à Hossegor, maintenant nous sommes 6. Quand je me suis installé en 1998, tous mes collègues avaient une double activité pour survivre économiquement. Ce n’est plus le cas, la nouvelle génération vit à 100 % des huîtres, grâce à l’essor des cabanes.»

Une histoire de pionnier et de succès
« J’y croyais mais pas à ce point », reconnait Jérôme lorsqu’il revient sur cette aventure, et ce qu’il faut bien appeler un pari risqué pour l’époque. « J’ai lancé la première cabane en 2004, absolument tout seul. Les anciens étaient dubitatifs. J’avoue, j’ai ramé pendant 6 ans puis à partir de la 7e année, j’ai commencé à mieux gagner ma vie et les autres ont suivi. Une des raisons de notre réussite, c’est que toutes les cabanes sont au même endroit. L’offre attire la clientèle. De plus, nous nous arrangeons entre nous pour qu’il y ait toujours au moins une cabane ouverte, y compris hors saison. »
« Ici, vous pouvez manger ou acheter des huîtres toute l’année à midi et jusqu’à 22 h l’été. »
Quand il a débuté, Jérôme accueillait 10 à 15 clients dans sa cabane au quotidien ; aujourd’hui il régale parfois jusqu’à 400 personnes dans la journée ! Même l’hiver, certains inconditionnels viennent savourer leur petite douzaine alors que la terrasse de Jérôme n’est pas chauffée.

Ni crevette ni vinaigre à l’échalote
Afin de ne pas concurrencer l’activité des restaurateurs, le cahier des charges des cabanes de dégustation d’Hossegor est très précis. Les ostréiculteurs ont le droit de servir à table leurs huîtres, bien sûr, du jambon, du pâté et des bulots, agrémentés de pain, beurre et mayonnaise. Deux vins, blanc et rosé, accompagnent ces produits. En revanche, interdiction de proposer des crevettes et du vinaigre-échalote à mettre dans l’huître. « La réglementation concerne également l’équilibre économique à respecter. 51 % de notre chiffre d’affaires doit être issu de la production et la vente des huîtres. Le produit de la dégustation, classé dans les ventes annexes, ne peut donc pas dépasser 49 %. Nous sommes très surveillés là-dessus et c’est bien normal. L’ostréiculture doit rester notre activité principale. »
Les lieux de dégustation sont également des points de vente à emporter. Ces débouchés fournissent une rémunération bienvenue pour les ostréiculteurs. « Moi j’ai 50 ans et je suis le plus vieux », constate Jérôme. En moyenne, les collègues ont moins de 30 ans, c’est bon signe. Le métier est aussi dur qu’avant, mais il attire davantage car la dégustation nous permet de mieux gagner notre vie, et de valoriser notre produit à son juste prix. C’est bien de voir des jeunes arriver. Il faut dire que nous bénéficions d’une belle attractivité touristique.»

Voyage sur les côtes atlantiques
Situés sur le lac, les parcs à huîtres d’Hossegor sont facilement accessibles. « Ici, on prend notre tracteur pour aller travailler à marée basse, ce qui est beaucoup plus rapide qu’à Arcachon. Le sol est en sable dur, on fait un aller-retour en 45 minutes quand il faut 6 h sur le Bassin. » Jérôme peut comparer, car il exploite 40 ares à Hossegor, quelques parcs sur le Bassin et 10 hectares en Bretagne. Cette organisation lui permet de tirer parti des meilleures spécificités de chaque région pour produire ses 90 tonnes d’huîtres annuelles, qu’il vend jusqu’à Dubaï : « La spécificité d’Hossegor est d’élever des naissains. Ils restent 9 mois ici puis partent 2 ans environ en Bretagne. Une fois les huîtres matures, elles reviennent dans le sud-ouest. Nous sommes très transparents avec les clients là-dessus, en précisant bien que les huîtres sont affinées en Bretagne. » Mais elles sont nées dans la belle nurserie landaise… grâce à un empereur !
